Qu’est-ce qui est inné ? Qu’est-ce qui est appris ? Depuis Claude Levi Strauss et l’opposition qu’il a déclaré entre nature et culture, le débat n’en finit pas d’occuper les philosophes. Le divorce est tel entre la seconde, bastion revendiqué du masculin, et la première, bastion attribué au féminin, que ces deux piliers de l’identité vacillent. A force de déprécier nature et féminin tout en survalorisant culture et masculin, on en est arrivé à un point où tout se mélange et plus rien n’existe vraiment ni les sexes, ni les genres. En y regardant mieux, on s’aperçoit que la culture est un faire valoir car elle ne peut être que le prolongement de la nature, à moins d’en être sa négation. Par contre, toute vie se fonde sur l’articulation entre Féminin et Masculin, les principes fondateurs de l’univers.
Le mal être existentiel
La question mérite d’être posée. Elle anime un débat dont la tournure ubuesque exige une réponse. Et on ne peut nier la souffrance d’une jeunesse aux prises avec un mal être existentiel aigü. Comment être pleinement soi ? Qu’est-ce qu’être soi ? Comment s’inventer ? Le wokisme, par l’extrémisme de ses positions, rejette tout point de repère structurant l’être. Il exige la dissolution de tous les codes, de toutes les règles, de toutes les barrières. Ce faisant, il atteint une absence de sens qui s’ouvre sur le néant de l’être. Un non lieu qui se voulait liberté et se révèle pure aliénation. A force de renier nature et féminin au profit de culture et masculin, on en vient à occulter la source de l’expérience car c’est par l’expression du corps que s’écrit une destinée.
La difficulté d’être pleinement soi n’est pas nouvelle. Elle ne se résoud pas facilement par une opération chirurgicale et une aide médicamenteuse. Ceux et celles qui croient y parvenir en changeant de sexe commettent une lourde erreur. Ce qui est en jeu, ce n’est pas être d’un sexe ou d’un autre. C’est valoriser ce qu’on est en apprenant à aimer ce corps en bonne santé qu’on a la chance d’habiter. Evidemment, l’exercice peut sembler périleux quand on a été méprisé.e à cause de son sexe, en raison d’une idéologie malsaine, haineuse du féminin et de ce qui lui ressemble. Là, pourtant se situe la clé du bien-être retrouvé et de l’épanouissement possible.
La haine de soi, cette compagne
La haine de soi est une maladie de l’âme que je connais bien. J’en ai souffert une grande partie de ma vie. En cause : la haine extrême que mon père nourrissait à mon égard. Il n’avait pas de mot trop fort pour me rabaisser, se moquer et m’agresser. C’est de cette façon qu’il se sentait fort et qu’il jouissait de la vie. Il ne trouvait une valeur qu’en se comparant à un féminin inférieur, si bien que ma révolte exigeait d’êre écrasée. Quoi que je fasse, quoique je dise, quoi que je prouve, rien ne pouvait trouver grâce à ses yeux. Mais le pire était qu’il disait m’aimer et qu’il le pensais. Il se croyait dans son bon droit et était incapable de ressentir de la compassion pour ma souffrance. La responsabilité de sa haine me revenait donc entièrement par l’épouvantable tare d’être née femme.
Ma vie était une torture. Respirer, le calvaire de me sentir exister. Je rêvais du confort de la mort, de sa paix, de son silence. Et puis, j’ai désespéré de ne pas être un garçon, pour être aimée ou, au moins, respectée, pour avoir le droit d’exister. Si la chirurgie de changement de sexe avait été accessible alors, j’aurais tout fait pour en bénéficier. Elle aurait peut être momentanément soulagé la douleur qui m’affligeait. Pourtant, elle ne m’aurait pas sauvée de ma propre haine. Pire, elle m’aurait empeché d’accomplir mon destin de femme. Celui-ci m’a révélé la beauté extrême du Féminin, la chance de l’incarner et les secrets qu’il m’a permis de percer et que je peux partager aujourd’hui.
Les rôles culturels reposent sur des vérités
Revenons maintenant à la question de départ. Qu’est-ce qui dans féminin et masculin relève de la nature et de la culture ? Je vais commencer par une affirmation apparemment ambigüe. Les rôles culturels reposent sur la vérité de notre nature, sinon, ils ne fonctionneraient pas. En effet, l’attribution sociale de la sensibilité, l’intensité émotionnelle, la compassion, l’amour inconditionnel et le sens du sacrifice maternel au Féminin est juste, De même, la force physique, le déploiment de l’énergie du corps, la passion du sexe et des sens sont bien des attributs du Masculin. Néanmoins, ces vérités sont tronquées et même vérolées par l’idéologie patriarcale.
Pour comprendre ce que sont Féminin et Masculin, il convient d’élargir notre perspective à l’univers lui-même. Car nous sommes le produit du cheminement de l’énergie depuis l’explosion du big-bang, il y a 14 milliards d’années. De plus, en choisissant ce référentiel, nous nous détachons du flou artistique que le biais culturel pose sur nos sociétés. Nous sommes, en conséquence, de même nature exactement que le reste des éléments universels. L’énergie initiale, quantique, s’est transformée en interagissant à travers une foultitude de processus physico-chimiques, pour créer les étoiles, les planètes, la vie. C’est ainsi que l’invisible a créé le visible, que l’impalpable, subtile, a créé les objets inertes ou vivants.
Emotions et corps
Cependant, si l’énergie quantique a créé les corps physiques, elle n’a pas disparu pour autant. Elle est toujours bien présente au plus profond de chaque objet et remplit ce que l’on croyait vide. On a découvert que l’insondable espace contient en fait 70% de la masse de l’univers ! Il est plein, ce vide, d’une matrice qui tisse un maillage invisible à travers l’univers. Les objets célestes eux-mêmes y sont suspendus et tenus en place. Cette substance quantique aussi appelée énergie noire est à la base de toute matière. Elle nous traverse et nous relie à tous les autres. Chaque être, chaque objet de l’univers détient donc deux dimensions : l’une, physique, est le Masculin, et l’autre, émotionnelle, est le Féminin. La nature s’implique donc dans le féminin et le masculin à la fois alors que la culture devrait être leur prolongement civilisationnel.
Nous sommes tous et toutes composé.e.s de Féminin et de Masculin. Notre nature énergétique, quantique, émotionnelle trouve forme dans la réalité par la création d’un corps physique. Toute matière naît, donc, de l’énergie émotionnelle, et, s’y dissout à la fin de son cycle de vie. L’émotion qui se manifeste par l’énergie ressentie délivre des sens qui sont le langage de l’être invisible que nous sommes aussi. Ainsi souffrons-nous quand il existe un décalage entre ce que nous sommes en vérité, des êtres sensibles, des êtres de liens, de respect et de compassion, et ce que nos valeurs culturelles erronées, de combat, de séparation et d’agression nous enjoignent d’exprimer.
Nous sommes semblables mais pas pareils
Ah, alors hommes et femmes seraient donc pareils ? Puisque nous sommes composés des mêmes énergies, émotionnelles et physiques, qu’est-ce qui nous différencie ? De toute évidence, le corps physique, qui ne fait qu’exprimer les sens contenus dans le corps (ou enveloppe) émotionnel, nous donne la réponse. Si nous nous ressemblons beaucoup, nous ne sommes pas tout à fait pareils. En effet, les sexes existent parce qu’ils revêtent un sens puissant qui a pour fonction de modifier l’expérience que nous faisons de la réalité.
La différence qui se matérialise par les sexes est inscrite dans l’enveloppe émotionnelle car celle-ci contient le programme et l’itinéraire de chaque expérience de vie. La structure de l’enveloppe émotionnelle comporte deux hémisphères. L’un a trait aux propriétés d’union, et l’autre a trait aux propriétés de séparation. Si l’énergie du premier est plus forte, le sexe sera Féminin, si l’énergie du second est plus forte, le sexe sera masculin. Les deux tendances, d’union et de séparation, coexistent en nous pour créer l’alternance. Le corps nous permet de nous séparer des autres pour que nous puissions faire le choix de nous approcher à nouveau. L’union se vit par l’émotion car dans la substance quantique, il n’y a aucune séparation.
Féminin et Masculin
Si nous possédons les même propriétés quantiques, nous sommes davantage doué.e.s pour certaines d’entre elles. Et, si nous acceptons de recevoir l’expérience du corps, celui-ci renforcera l’inclination programmée. Par exemple, les femmes ressentent les cycles. Elle savent que l’énergie n’est pas constante et que le corps est fragile. Elles apprennent à en prendre soin et à en tenir compte. En plus, l’union q’elles vivent dans leur corps, avec l’homme par la sexualité, et avec l’enfant à naître, par la gestation, renforce cette connaissance, tout comme la force de leurs émotions. Leur attention se concentre en priorité sur l’invisible. Le Féminin, c’est donc, l’énergie émotionnelle, l’émotion, la sensibilité, l’invisible, l’union.
Au contraire, l’homme ne ressent que peu les variations cycliques de l’énergie vitale et l’union sexuelle se passe à l’extérieur grâce à un autre corps. De plus, le ressenti des émotions est moins fort. La testostérone joue un rôle pour atténuer la connexion à l’invisible quantique. Ceci a pour but de tourner l’attention de l’homme vers l’extérieur, le visible, la matière. Le Masculin, c’est donc le corps, la matière, les désirs sensuels, et l’énergie physique qui se déploie. Alors que les femmes acquièrent une connaissance de l’invisible émotionnel, qui est vérité, les hommes développent une connaissance du visible, qui est réalité.
Le droit de choisir
Quand féminin et masculin sont également valorisés, nature et culture se superposent pour créer une réalité favorable à l’épanouissement individuel et collectif. Les femmes transmettent les lois émotionnelles constructrices de l’idéal souhaité, qui n’est autre que l’Amour, la substance universelle aussi appelée matière noire. Et les hommes mettent en oeuvre les interactions nécessaires pour que ces lois soient maintenues dans la réalité. Il y a donc autant de beauté à être une femme qu’à être un homme, et peu de destins nécessitant de transformer sa nature sexuelle. Cependant, certaines personnes doivent peut-être le faire pour témoigner de la souffrance que provoque la désacralisation du corps, en ces temps troublés où les vivants sont déchus au profit des machines. Car évidemment, chaque adulte est libre de choisir son chemin de vie et nul.le ne saurait lui renier ce droit.